Hors concours
« Qu’est-ce qui m’incite à écrire ?... » Bonne question Jacqueline, je te remercie de l’avoir posée.
Si on m’avait demandé ce qui m’incite à lire, j’aurais pu vous en écrire des pages, hélas ce n’est pas exactement le sujet, je serai donc plus bref.
S’agissant d’écrire de la poésie, ma réponse se limiterait à quelques noms que je ne citerai pas. L’inspiration d’une muse est souvent une condition nécessaire mais il reste difficile pour moi de trouver une raison suffisante pour écrire. J’attends de lire vos contributions pour découvrir avec curiosité ce qui vous y incite. Pour ma part, je ne vois pas… Manque total d’imagination et de sensibilité poétique.
Par contre, et je me répète, lire les poètes d’ici et d’ailleurs, d’hier et de maintenant est souvent un plaisir, qu’ils s’expriment en vers ou en prose comme dans la plupart des commentaires. Dans ma carrière professionnelle j’ai été amené à écrire nombre de rapports techniques. Je vous rassure, le goût et le plaisir m’ont quitté avec mon passage à la retraite. Promis, je n’en produirai plus, j’ai déjà suffisamment sévi.
Je ferme cette longue parenthèse car je pars encore hors sujet. Il faudra que je touche deux mots à Murielle à ce propos : on dirait qu’elle a fait exprès de choisir ce thème peu propice à ma montée sur le podium afin de profiter des louanges attendues comme il me doit. Pour la punir, je posterai en « hors concours ». A mon âge, je ne vais pas commencer à me laisser faire.
Quittant le domaine de la poésie pour celui de la prose, je serai un peu plus prolixe. J’adore notre belle langue et ses subtilités, même si je ne les comprends pas toujours. On dirait que j’ai été élevé à l’ « almanach Vermot » ainsi qu’aux « blagues carambar » (les anciens pourront expliquer aux jeunes).
En grandissant je me suis tourné vers les poètes mais j’ai aussi vite renoncé à essayer de suivre dans leur voie, me contentant de les admirer sans les copier. Je n’hésite pas à remonter dans le temps avec, par exemple, Villon, Rabelais et Ronsard visités récemment. Les grands de la chanson, les incontournables Brel, Brassens, Ferré, Ferrat, Mouloudji, Nougaro et bien d’autres m’ont laissé coi. Il est d’ailleurs préférable de me taire pour mieux les écouter.
Les jongleurs de mots, les Devos, Lapointe le fameux Boby continuent depuis toujours à me laisser pantois. Leur art d’accorder les mots, de les rapprocher, de les télescoper, de faire mille pirouettes jamais ne me lasse. Leur talent est si grand qu’ils ne peuvent me servir de modèle. Il est possible cependant qu’ils exercent inconsciemment une certaine influence sur mon goût de jouer avec les mots. L’Oulipo ne m’est pas indifférent et Pérec m’éblouit par sa virtuosité inégalée…
Si vous ne voyez aucun rapprochement entre mon "inspiration" et tous ces Grands, soyez rassurés, je ne vous en voudrais pas. Le lien, s’il y en a un, est suffisamment ténu pour ne pas apparaitre clairement.
S’il me faut parler de besoin, d’envie, de passion la question sera vite réglée : ces moteurs traditionnels de l’écriture me sont totalement étrangers et je n’ai nul besoin d’en disposer pour me livrer à écrire quelques mots. Je m’y attelle (presque au sens propre) moins laborieusement dès lors qu’une idée fugitive, un coup de cœur ou un coup de colère m’y porte de manière irrésistible. Cette occurrence ne se reproduit pas trop souvent. Estimez-vous heureux de ne pas en avoir trop à supporter. Par contre si vous souhaitez plus grande participation de ma part, veuillez m’en excuser d'avance, je ne sais pas écrire sur commande.
S’il m’est impossible de passer une journée sans rien lire, par contre me dispenser totalement d’écrire ne me provoque aucune gêne.
J’avoue cependant n’avoir su toujours résister aux pressions amicales exercées à mon endroit… mais que cela reste entre nous et ne l’ébruitons pas tant cela m’a couté. J’ai fait aussi une exception au point de récidiver en acceptant une nouvelle fois de répondre positivement à une sollicitation toujours aussi amicale que pressante. Je ne citerai pas son nom de peur que certains n’essaient de lui extorquer sa recette pour me faire écrire.
Vous l’aurez peut être observé, je suis aussi enclin à une forme de paresse naturelle, influencé cette fois par le cinéma (j’aurais pu faire la doublure de P.Noiret quand il jouait « Alexandre le bienheureux).
Si j’en viens aux thématiques poétiques, je mentirais en disant que ma palette est étendue. Vous auriez raison et moult arguments pour me contester. Du fait d’un manque total d’imagination, ma seule inspiration provient de ce que je vois, je vis, j’entends, je lis ou j’observe dans un rayon limité. S’y mêlent quelques marques d’amourité (j’emprunte à Philaly – sans lui avoir demandé - ce terme inventé pour nommer cet espace mal délimité entre l’Amour et l’Amitié), de dénonciation parfois... le tout teinté autant que possible d’un peu d’humour et d’autodérision. Tous les arts me touchent, sensible aux images, la peinture a pu parfois m'inspirer quelques vers diversement appréciés.
Certains paraît-il voient dans mes écrits quelques traces de coquinerie (si peu par rapport à notre étalon de Kinkin). Si tel est le cas, ce ne peut être que le résidu d’un esprit juvénile attardé. Pour essayer de me justifier je vous livre une citation de Platon que je vous invite à contester si vous avez des arguments : « Il n’est pas de plaisir plus puissant que celui dispensé par Eros ». Avec le « Carpe diem » du poète Horace, voilà un cocktail hautement recommandable me semble-t-il.
Les courageux lecteurs et lectrices qui m’auront suivi jusqu’ici (s’il y en a) chercheront peut être la cause de cette logorrhée. La réponse est simple : par taquinerie j’ai voulu prendre à contre-pied certaines personnes qui constataient, en me le reprochant gentiment, l’approche du premier anniversaire de mon année sabbatique (presque un an sans poster de poème…). J’espère avoir atteint mon but.
Même si elles ne me lisent pas jusqu’au bout, j’en connais qui risquent de tomber sur leur séant. J’espère que les conséquences du choc resteront limitées.
Un conseil d’ami pour finir, ne laissez jamais un fainéant prendre la parole, il ne voudra jamais vous la rendre