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Le voyageur immobile (1)

#1
Le voyageur immobile


Lorsque la nuit étend son voile grandiose
Et que le corps en paix mon âme se repose,
Mon esprit se libère et vogue vers les cieux
Afin de jouir, un temps, aux contes mystérieux
Qui peuplent les régions insondées de l’abîme,
Et qui savent si bien amener au sublime.
Dans ces endroits secrets, tout est immatériel
Mais, pourtant, j’évolue dans un lieu naturel
Où tout m’est familier, même cette chimère
Sur laquelle, à cheval, je survole la terre
Pour y chercher un coin, un bout de paradis
Qui puisse m’accueillir ? Or, je reste indécis
A choisir un endroit, une rive, une plage
Que le vaste océan à jamais n’endommage,
Dont l’azur est serein, sans nuage, sans vent,
Une brise exceptée qui souffle très souvent
Pour porter la fraîcheur au sein de cette terre
Que ne sauraient troubler les échos du tonnerre.
Oui, découvrir ce lieu, cet Eden perdu
Que Dieu, pourtant clément, ne nous a pas rendu,
Me laisse à hésiter dans mon vagabondage.
D’un pays inconnu se découpe un rivage
Dont je suis les contours, où vient mourir le flot
Qui recouvre le sable et s’estompe, aussitôt
Absorbé dans le sein d’un continent avide,
Suçant, avec douceur, chaque goutte du fluide
Pour ne pas se laisser submerger par les eaux
Que l’océan rejette, en d’énormes rouleaux.
J’aborde une falaise, où le plateau domine
La vague qui s’éteint dans le fond de l’abîme.
Je me fraie un chemin à travers les buissons,
Ecorchant mon habit parmi les frondaisons
Où gîtent des oiseaux criards, à mon approche,
Qui semblent me défier, me lancer un reproche
Pour oser, insolent, violer ainsi ces lieux
Interdits aux humains par trop peu scrupuleux.
Je comprends leur frayeur, et je m’enfuis très vite,
Je rejoins ma chimère, et nous quittons le site
Remontant vers le ciel, dans un vol si léger
Que la brise de mer semble nous emporter.
La côte disparaît faisant place à la plaine
Dont le parfum des fleurs attise mon haleine
Mais, déjà, au lointain, se dessine une ville.
Devoir m’y arrêter me paraît inutile,
Je poursuis donc ma course, au gré de mon désir,
Sur mon cheval volant qui hennit de plaisir.
Je survole des champs brunis par la lumière
Avant d’apercevoir une large rivière
Dont la face est ridée par quelques tourbillons.
Je les vois, d’où je suis, comme des médaillons
Collés sur un habit, d’une grise fadeur
Qui serait rehaussée par un peu de couleur.
J’entrevois une barque attachée à la rive,
Pour ne pas que le flot l’entraîne à la dérive
Au milieu du courant qui conduit à la mer,
Une chaîne retient, par ses anneaux de fer,
Qui tendue à craquer n’en résiste pas moins,
La frêle embarcation qui reste, néanmoins,
Sur les eaux à flotter d’un doux balancement
Près d’un arbre immergé, qui passe lentement.
Cet endroit, tout à coup, me semble trop humide
Et, pour m’en échapper, je tire sur la guide.
Ma monture bondit, m’emportant dans son vol,
Je fais corps avec elle et me tiens à son col
Pour éviter la chute, emporté par l’élan
Qui anime ce pur et très noble alezan.
Durant quelques instants, je suis le cours de l’onde,
Découvrant des marais à l’eau nauséabonde,
Je reviens vers les champs où frémissent les blés
Sous les coups des faucheurs qui se sont rassemblés.
Avec des crissements, les faux tranchent les tiges
D’un ample mouvement qui donne des vertiges
Et, je songe à la mort qui moissonne les hommes
Sur le pré des combats, vers la fin des automnes.
Je chasse la vision de l’affreuse sorcière
En poussant un juron, d’une façon grossière
Qui dénote ma haine, et encore, mon mépris
Pour la reine du deuil, maîtresse du gâchis.
Je cherche à m’éloigner de ce décor champêtre
Pour survoler un bois, me disant que, peut-être,
Je pourrais m’y poser pour reprendre mon souffle.
A voyager ainsi, quelquefois je m’essouffle,
Mon cœur a des sursauts, mon haleine s’attise,
Et chuter dans mon vol devient une hantise.
Trouvant dans le feuillage une vaste clairière
J’invite à s’y poser ma fidèle chimère.
Je descends de son dos, me couche sur la mousse
Pour goûter le silence, et le vent qui repousse
Comme des bras géants, des grands arbres la cime,
Tandis que, dans les cieux, un rond d’argent culmine.
Je distingue à souhait sur l’astre de la nuit
Chacun de ses reliefs, et je reste interdit
En songeant que des hommes ont foulé de leurs pas
Ce sol mystérieux, si loin de nos frimas.
La fraîcheur de la nuit, qui m’arrache un frisson,
Rappelle mon esprit à la juste raison.
Je rejoins mon coursier qui, paisiblement, broute;
Je grimpe sur son dos, puis il reprend sa route
M’entraînant vers le ciel, survolant un nuage
Avant que n’apparaisse un nouveau paysage.
Or, à peine entrevu, il s’estompe au lointain,
Et mon rêve mourant me retrouve incertain,
Etendu sur le dos au milieu de ma couche,
Avec les yeux mi-clos et, au coin de la bouche
La larme du regret d’un paradis perdu
Comme si, brusquement, Dieu m’en avait exclu.
 

lebroc

Maître Poète
#2
C'est vraiment superbe Jak - Je vais le classer dans mes favoris
Un grand moment de lecture que tu nous offres
1 vote et mille applaudissements
Passe une bonne soirée mon ami
Bisous Papy!
 

Ashwaria

Nouveau poète
#6
Jamais je n`ai lu un reve aussi bien decrit!
Les images, les idees d`evasion, c`est un voyage extraordinaire que j`ai effectue en ta compagnie! J`ai beaucoup aime le vol et je suis impatiente d`embarquer pour de nouvelles destinations de reves.
A quand le prochain depart?
Miiiiiiille bravos, 1 vote amplement merite!
Amities, M