Inspiré par le post de mon amie Paule, voici la réponse que je transmets à mon ami ARTHUR RIMBAUD (1854~1891)
[Illustration : © Liliane Silva Le Fur]
III
Au bois il y a un oiseau, son chant vous arrête et vous fait rougir.
Il y a une horloge qui ne sonne pas.
Il y a une fondrière avec un nid de bêtes blanches.
Il y a une cathédrale qui descend et un lac qui monte.
Il y a une petite voiture abandonnée dans le taillis, ou qui descend le sentier en courant, enrubannée.
Il y a une troupe de petits comédiens en costumes, aperçus sur la route à travers la lisière du bois.
Il y a enfin, quand l’on a faim et soif, quelqu’un qui vous chasse.
IV
Je suis le saint, en prière sur la terrasse, — comme les bêtes pacifiques paissent jusqu’à la mer de Palestine.
Je suis le savant au fauteuil sombre. Les branches et la pluie se jettent à la croisée de la bibliothèque.
Je suis le piéton de la grand’route par les bois nains ; la rumeur des écluses couvre mes pas. Je vois longtemps la mélancolique lessive d’or du couchant.
Je serais bien l’enfant abandonné sur la jetée partie à la haute mer, le petit valet, suivant l’allée dont le front touche le ciel.
Les sentiers sont âpres. Les monticules se couvrent de genêts. L’air est immobile. Que les oiseaux et les sources sont loin ! Ce ne peut être que la fin du monde, en avançant.
(Illuminations, 1886)
Cher Arthur,
ce bois je le connais, mon âme vagabonde hante souvent son sentier aride, hélas rien ici n’est immuable, l’oiseau ne chante plus depuis longtemps, un silence morbide plombe ce qui autrefois était un lieu magique, et où la vie agitait dans sa fragilité extrême le moindre feuillage tendrement humecté, puis osait renaître tous les matins au rythme lent du temps, cadencé par le long balancier solaire aux ombres fuyantes, placé sous l’aile protectrice et fragile des lois divines aux résonances claires lointaines, encensé grâce au sage livre de l’existence à l’enveloppe désormais scellée, celui où la voix de la raison sonnait au diapason des grandes décisions célestes dictées jadis sous la plume de l’ordre saint universel.
Illustration Liliane Silva Le Fur
[Illustration : © Liliane Silva Le Fur]
III
Au bois il y a un oiseau, son chant vous arrête et vous fait rougir.
Il y a une horloge qui ne sonne pas.
Il y a une fondrière avec un nid de bêtes blanches.
Il y a une cathédrale qui descend et un lac qui monte.
Il y a une petite voiture abandonnée dans le taillis, ou qui descend le sentier en courant, enrubannée.
Il y a une troupe de petits comédiens en costumes, aperçus sur la route à travers la lisière du bois.
Il y a enfin, quand l’on a faim et soif, quelqu’un qui vous chasse.
IV
Je suis le saint, en prière sur la terrasse, — comme les bêtes pacifiques paissent jusqu’à la mer de Palestine.
Je suis le savant au fauteuil sombre. Les branches et la pluie se jettent à la croisée de la bibliothèque.
Je suis le piéton de la grand’route par les bois nains ; la rumeur des écluses couvre mes pas. Je vois longtemps la mélancolique lessive d’or du couchant.
Je serais bien l’enfant abandonné sur la jetée partie à la haute mer, le petit valet, suivant l’allée dont le front touche le ciel.
Les sentiers sont âpres. Les monticules se couvrent de genêts. L’air est immobile. Que les oiseaux et les sources sont loin ! Ce ne peut être que la fin du monde, en avançant.
(Illuminations, 1886)
Cher Arthur,
ce bois je le connais, mon âme vagabonde hante souvent son sentier aride, hélas rien ici n’est immuable, l’oiseau ne chante plus depuis longtemps, un silence morbide plombe ce qui autrefois était un lieu magique, et où la vie agitait dans sa fragilité extrême le moindre feuillage tendrement humecté, puis osait renaître tous les matins au rythme lent du temps, cadencé par le long balancier solaire aux ombres fuyantes, placé sous l’aile protectrice et fragile des lois divines aux résonances claires lointaines, encensé grâce au sage livre de l’existence à l’enveloppe désormais scellée, celui où la voix de la raison sonnait au diapason des grandes décisions célestes dictées jadis sous la plume de l’ordre saint universel.
Illustration Liliane Silva Le Fur
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