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De l'illumination au brouillard

#1
Chaque matin, lorsque j’ouvre difficilement mes yeux,
Je me demande si les tiens le sont déjà.
Lorsque je marche, seul, vers ces cours ennuyeux,
Je me demande si aujourd’hui on se verra.

Je te croise, de temps en temps.
On discute, pas très souvent.
Je te regarde, lorsque je le peux.
Je te désire, crime odieux?

Dans tes yeux, quelque peu mystérieux,
Je ne vois nullement mon reflet.
Au contraire, lorsque j’ose m’y enfoncer,
Je vois le portrait, quelque peu brumeux,

D’un beau jeune homme, intelligent, adroit.
Je vois soudain ces yeux s’éclairer.
Le portrait, peu à peu, tend à s’illuminer.
Ce jeune homme, qui semble te dicter sa loi,

Ce chanceux, qui semble conquérir ton cœur,
Je crois bien que je le reconnais.
Oui! Bien sûr! Suis-je donc si aveugle, si niais?
Cet homme, à qui tu confies ta fin ou ton bonheur,

Cet homme que jamais je ne pourrais concurrencer,
Cet homme que jamais je ne pourrais jalouser,
Cet homme, source de ma plus grande jalousie,
Je le connais. C’est mon ami.

Mon amour, je suis un homme d’honneur:
Si je dois souffrir pour votre bonheur,
Daigne m’accorder un ultime regard
Avant de me voir disparaître dans un éternel brouillard.